Les travaux de cet axe s’intéressent aux reconfigurations des relations entre États et sociétés dans des pays ayant connu des bouleversements violents, conflits armés essentiellement, mais aussi répressions policières ou transformations économiques radicales. Si les espaces (Europe de l’Est, Union soviétique et pays de l’ex-URSS) ainsi que les périodes envisagées (post-première et seconde guerre mondiale, années 1990-2000) sont différents, ces terrains présentent en revanche un certain nombre de points communs. Dans ces sociétés fracturées, où les rapports sociaux se redéfinissent, l’autorité de l’État se déploie selon de nouvelles modalités, souvent de manière autoritaire (qu’il s’agisse ou non de régimes communistes). Les travaux réunis au sein de cet axe s’intéressent plus particulièrement aux acteurs individuels et collectifs de ces recompositions, dans toutes leurs différences, à leurs trajectoires et à leurs pratiques. Ils se déploient au sein de deux sous-axes.

Reconfigurations du monopole de la violence étatique

Les situations de sortie de conflits sont particulièrement propices à la renégociation des frontières entre État et société. D’un côté, les États en voie de « reconstruction » cherchent à recouvrer pleinement le monopole de la violence, par la répression (épuration, pacification militaire et policière), mais aussi par l’intégration (anciens combattants). En impliquant des populations dans leurs pratiques de répression, ils provoquent ou instrumentalisent des antagonismes réels. D’un autre côté, des groupes de citoyens cherchent à prendre en charge ces mêmes fonctions étatiques, dans une logique de concurrence ou encore de complémentarité et d’appui à l’action étatique. L’axe saisira l’ensemble de ces dynamiques, souvent génératrices de nouvelles violences, à partir du cas des procès des criminels de guerre au sortir de la seconde guerre mondiale, des politiques judiciaires et extra-judiciaires de lutte contre les insurrections dans l’après-guerre, des vétérans et combattants des conflits soviétiques et postsoviétiques, des groupes vigilantistes et des forces de citoyenneté policière en Russie et en Ukraine contemporaines.

Redéfinition des rapports sociaux et justice

Ces reconfigurations sont indissociables d’une redéfinition des rapports sociaux dans des sociétés bouleversées, que les travaux de cet axe abordent en particulier sous l’angle des notions de loyauté et de justice. Il s’agit de voir tout d’abord les différentes modalités de « mise en procès » du passé, à travers l’élaboration de différents récits (vilains et héros de la guerre, crimes du communisme) mais aussi de procédures concrètes : jugement des criminels de guerre, politiques de lustration, procédures de réhabilitation, restitutions de biens nationalisés ou compensations financières. L’articulation entre la mémoire de la seconde guerre mondiale et celle du communisme est, dans toute la zone (Ukraine, Biélorussie, Pologne, États Baltes), particulièrement importante. Il s’agit d’autre part d’observer la manière dont se fait la réintégration de certains groupes (retour des déplacés forcés et des prisonniers des camps en Ukraine et dans les républiques Baltes, retour des Russes émigrés après la Révolution, etc.), impliquant une confrontation des mémoires et une redéfinition des critères de la vie en commun. Cette « vie en commun » renouvelée passe également par différentes modalités d’implication des acteurs dans l’exercice de la justice ou différentes formes de contrôle citoyen (Union soviétique des années 1960, lutte contre les violences policières en Russie actuelle). Ce projet porte une forte ambition comparative, puisqu’il s’agit non seulement de faire dialoguer historiens et spécialistes du monde contemporain, mais aussi de s’ouvrir aux comparaisons avec d’autres aires géographiques.

Projets

→ ANR Jeunes chercheurs : « WWIICrimesOnTrial, 1943-1991 » (Vanessa Voisin)
→ Projet du Fonds de préfiguration du Labex Tepsis « Témoignages de guerres dans les aires soviétiques et post-soviétiques. Regards croisés : Afghanistan (1979-1989) / Tchétchénie (1994-2009) » (Anna Colin-Lebedev, Cloé Drieu et Elisabeth Kozlowski)

Partenariats

Institut des sciences sociales du politique (ISP), Paris Nanterre
Centre d’Études Turques, Ottomanes, Balkaniques et Centrasiatiques
Centre Chine de l’EHESS
Fondation Maison des sciences de l’homme (FMSH)
Fonds russe pour les sciences humaines (RGNF)
Fondation Mémoire de la Shoah
Centre Marc Bloch de Berlin
Labex Création, Arts et Patrimoines (CAP)
Haut Collège d’Économie de Moscou
Centre d’études franco-russe (CEFR) de Moscou
Université Libre de Bruxelles